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2 décembre 2011 5 02 /12 /décembre /2011 23:59

Mon Journal

 

La terreur de ces dernières semaines est presque plus que je ne puis en supporter. Comment se fait-il qu'en rédigeant ces quelques mots je puisse en quelque sorte tenir la folie à distance ? C'est comme si je confessais mes fautes à quelque compagnon silencieux, ou libérais mes pensées torturées pour les confiner sur le papier.

 

J'ai commencé un journal avant celui-ci, mais il est resté à un endroit où je ne puis retourner. Je reprends donc tout du début. Mais du vrai début, cette fois-ci.

 

Tout a commencé avec la découverte de cette maudite faux au Destin de Roland. Avant la Faux, il n'y avait rien de plus terrible ici que dans la vallée de Comté-du-nord.

 

Mais depuis que j'ai trouvé la hampe de la faux dans un tas de déchets de la mine et que, malédiction sur moi, je l'en ai extirpée, le Destin de Roland est devenu un lieu de mort impie !

 

Si j'avais su ce qui allait se passer, je me serais coupé la main pour m'empêcher de récupérer ce morceau de bois gravé de runes. Je suis bourrelé de remords. J'ai toujours pensé que c'était le privilège des vieux. Je sais maintenant que ce ne sont pas les vieux, ce sont les sans-espoir, qui portent le fardeau du regret, incapables d'en débarrasser leurs misérables épaules.

 

Mais assez pleuré, je ne suis pas poète. Je dois continuer ma chronique...

 

Après l'exhumation de la Faux, un changement s'est opéré dans la mine. La lumière a tremblé au bout de nos torches, et la force de nos voix a paru échapper à notre contrôle. Parfois le murmure d'un homme rugissait dans les tunnels, à en être assourdissant, parfois nos vociférations portaient à quelques pas seulement avant de s'évanouir dans l'air.

 

Eprouvant, certes, mais ces bizarreries ne sont rien en comparaison de ce qui nous a vraiment chassés de la mine. Les worgens.

 

Ils ont surgi de partout, sortant de trous à nos pieds, tombant d'escarpements au-dessus de nos têtes. La moitié de nos hommes sont tombés dans ces premières minutes de panique. Les autres ont essayé de fuir. Moi aussi. Tout en courant, j'ai vu nombre de nos frères se faire déchiqueter, entendu bien des cris sombrer dans le silence après un gargouillis.

 

Pour autant que je sache, je suis le seul à en avoir réchappé.

 

J'ignore comment j'ai survécu cette nuit-là. J'ai toujours été prudent, toujours rapide à fuir les plaies et les bosses. On me traite de froussard depuis toujours. C'est même pour ça qu'on m'a surnommé "La Tremblote". C'est peut-être ce fort instinct de conservation qui m'a sauvé...

 

Ou peut-être est-ce la Hampe que j'ai arrachée aux décombres. Ce ne peut-être la Faux elle-même, je l'ai perdue dans ma course éperdue. Mais si c'est moi qui ai ramené les worgens dans le bois de la Pénombre, peut-être m'ont-ils fait la grâce de me laisser survivre. Qu'ils soient maudits !

 

Ou peut-être suis-je condamné à être le témoin des changements que j'ai attirés sur le bois de la Pénombre. Peut-être est-ce mon destin de voir les worgens déchirer cette terre en lambeaux et la plonger dans les ténèbres.

 

Si tel est vraiment mon destin, alors il est double. Car les worgens ne sont pas la seule puissance à vouloir le bois de la Pénombre : les misérables du défilé de Deuillevent ont également leurs projets.

 

Ce sera le prochain chapitre de ma narration, et je souhaite que ce soit le dernier...

 

Après avoir fui le Destin de Roland, je me suis caché dans une grange appartenant à un homme du nom de Sven. J'ai passé quelques jours dans la grange et une telle horreur me possédait que je n'ai jamais signalé ma présence à Sven ni à sa famille. Mais de ce que j'ai vu depuis ma cachette, j'ai compris que ces fermiers étaient d'honnêtes gens. Si j'étais sorti de mon recoin, je crois qu'ils m'auraient offert l'hospitalité, mais je ne suis pas d'un naturel confiant. Surtout depuis ce choc dans la mine.

 

Alors je suis resté caché. Et cela a sauvé ma vie.

 

Quelques jours après mon arrivée à la grange, Sven quitta sa ferme pour Sombre-comté. Il embrassa sa femme et ses enfants et promit de vite revenir avec des jouets et des bonbons. Pauvre vieux ! Ce fut la dernière fois qu'il vit sa famille en un morceau.

 

Au moins se sont-ils quittés heureux. Au moins sa femme a-t-elle été la première à mourir, sans devoir assister au meurtre de ses enfants. Mais je n'ai pas eu cette chance. J'ai vu ce qui s'est passé, et cela hantera mes rêves toute ma vie.

 

Mes mains tremblent tandis que je bats le rappel des souvenirs de cette nuit, Sven au loin et sa famille seule face aux Cavaliers Noirs. Les regrets se saisissent à nouveau de moi, car j'aurais pu me dresser contre ces mécréants du défilé de Deuillevent. Mais c'est un faux regret. Tout rescapé d'une tragédie connaît les mêmes. Je le sais bien, si j'avais quitté ma cachette, j'aurais été tué aussi, mon corps dépecé, ses morceaux dispersés, mutilés, impossibles à reconnaître.

 

Mais j'ai beau savoir que je ne pouvais rien faire pour empêcher ce massacre, un vrai regret me taraude : c'est moi qui ait attiré les Cavaliers Noirs jusqu'à la ferme de Sven. Non seulement ma découverte de la Faux a ouvert aux worgens la porte du bois de la Pénombre, mais elle a aussi attiré les Cavaliers jusqu'au défilé de Deuillevent.

 

Je le sais parce que, juste avant de commencer leur boucherie, ils ont posé une question à la femme de Sven qui serrait ses enfants contre elle pour leur prodiguer le peu de réconfort qu'elle pouvait avant une mort certaine.

 

La Faux d'Elune ! hurla l'un des Cavaliers d'une voix dure et pourtant suraiguë, comme le feulement d'un fer de hache contre une pierre. Et il glapit le dernier mot, Elune, comme s'il butait dessus.

 

La panique s'est emparé de moi lorsque j'ai entendu cette voix, à cause de son timbre ignoble, et parce que... je savais de quelle Faux parlait le Cavalier. Ce ne pouvait être que l'objet maudit que j'avais arraché aux roches du Destin de Roland quelques jours plus tôt. C'est cela que cherchaient les Cavaliers Noirs !

 

Et c'est cela qui scella le destin de la famille de Sven.

 

J'ignore comment se nommait la femme de Sven, tant ils abusaient des "chérie", "mon amour" et autres "maman" dans la famille. Mais je voudrais le connaître. Je suis la mémoire vivante de ses gestes ce jour-là. Et bien qu'elle ne fût qu'une femme de fermier, je n'ai jamais vu quiconque se comporter avec plus de bravoure.

 

Bien sûr, elle ne savait rien de la Faux, mais quand elle a compris que les Cavaliers le cherchaient, un plan a germé dans sa tête.

 

C'était audacieux et astucieux. Si seulement ça avait marché.

 

La Faux ? a-t-elle dit d'une voix calme. "Je sais tout, bien sûr. Comme tout le monde ici." Elle fixa les Cavaliers d'un regard posé et, si je n'avais pas su la vérité, j'aurais été convaincu qu'elle savait tout de la Faux.

 

Son pari a fonctionné. Le Cavalier qui avait posé la question se pencha légèrement vers elle et a croassé : "Où ?"

 

"Je vais tous vous y conduire", a-t-elle répondu, et une lueur d'espoir a dansé dans ses yeux.

 

Mais c'est loin d'ici et mes enfants nous ralentiraient. Nous devons les laisser."

 

Son plan était simple, mais ce sont les plans simples qui ont le plus de chances de fonctionner. Elle avait une chance d'éloigner les Cavaliers de la ferme. Elle n'avait aucun espoir pour sa propre vie mais ses enfants seraient sauvés. Il suffisait que les Cavaliers acceptent ses courageux mensonges.

 

Je n'ai jamais été un adepte de la Lumière, mais j'ai prié pour la femme de Sven tandis qu'elle faisait face aux terribles Cavaliers.

 

"Par pitié", ai-je prié. "Faites qu'ils mordent à l'hameçon."

Ils attendaient, immobiles, et elle soutenait leur regard avec calme. Soudain, un cavalier a levé la tête, comme s'il entendait un appel distant. Il a tiré d'une poche une petite gemme et a regardé dedans. Puis il a fait un geste avec la verroterie vers la femme de Sven. Une lumière a jailli du cavalier et s'est avancée vers la femme sous forme d'une main blanche. La fermière a regardé la lumière sans bouger, mais une nuance d'incertitude a fendillé son masque de confiance. Quand la main l'a atteinte, ses doigts se sont ouverts au-dessus de son crâne.

 

Puis ils ont serré.

 

La femme de Sven était comme pétrifiée et ses yeux se sont écarquillés. Ses lèvres se sont ouvertes pour pousser un cri, mais aucun son n'est sorti de sa bouche. Après quelques instants de cette torture, la main l'a relâchée et elle est tombée à genoux. Le Cavalier qui tenait la gemme se redressa sur sa selle et une voix forte retentit.

 

"Cette femme ment", lâcha-t-il d'une façon qui hante encore mes cauchemars. "Elle n'a pas vu la Faux."

 

Après cela, les épaules du Cavalier se sont abaissées légèrement, comme si un esprit le quittait. Puis, de la voix stridente qu'il avait à son arrivée, il a prononcé ces derniers mots :

 

"Le Maître a parlé. Tuez-les."

 

Je ne peux décrire ce qui s'est passé ensuite. C'est précis dans mon esprit, mais même mon âme misérable ne peut mettre par écrit les événements des terribles minutes qui suivirent.

 

Je ne peux que dire que la famille de Sven est morte. Peu après, Sven est revenu sur les lieux de cette scène atroce. Il a éclaté d'une telle douleur que je n'ai pas eu le courage de me montrer. Et de peur qu'il ne me trouve, je me suis enfui de ma cachette dans la grange. J'ignore ce qu'il est advenu de Sven, mais je prie qu'un jour il trouve la paix.

 

J'ai passé les quelques semaines suivantes à errer de lieu en lieu, toujours saisi par la peur des Cavaliers noirs. Je me trouve actuellement dans la ville abandonnée de Colline-aux-Corbeaux, caché, comme toujours. Je ne suis pas de taille à affronter la force qu'ils ont déployée contre la femme de Sven et je sais qu'ils fouillent toujours le bois de la Pénombre à la recherche de la Faux. Je ne l'ai plus, et j'en remercie la Lumière, car si je l'avais gardée, ils m'auraient trouvé. Même aujourd'hui, je sais au fond de moi qu'ils finiront par me trouver.

 

Je suis si fatigué.

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